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Par Dominique de Poucques - 19 septembre 2024
Ce roman nous plonge au milieu des années 80 dans un quartier chic de San Francisco. Eulabee a treize ans, une bande de copines et un regard lucide sur le monde qui l’entoure. Elle voit bien que depuis que le corps de son amie Maria Fabiola s’est transformé, révélant des formes généreuses, plus personne ne la regarde de la même façon. Téméraire et vive, elle nargue la nature et les éléments, escaladant les falaises, bravant la marée. Sagace, elle avance dans l’existence en distribuant dans ses interactions sociales un savant mélange de candeur et de hardiesse. Les ennuis commencent pour elle lorsqu’elle choisit de ne pas corroborer la déclaration des filles faisant état d’une rencontre avec un exhibitionniste. À partir de cet incident, elle sera rejetée par ses amies puis vite ostracisée par la majorité des élèves du lycée. Des années plus tard, elle recroisera le chemin de l’une d’elles, ce qui la forcera à replonger dans cet épisode de l’adolescence, un temps dont certaines n’ont jamais réussi à s’échapper vraiment.
L’auteure pose un regard perçant sur une société louant la beauté plus que toute autre caractéristique. Les prémices de cette tendance actuelle à porter aux nues le paraitre seraient à situer dans les années 80, l’époque où Eulabee observait que « Ici, tout ce qui est moche est caché. » Personnage attachant, l’adolescente perçoit les intentions des individus par une analyse fine de leurs comportements. Rien ne lui échappe et son sens de l’observation lui permet de cerner la personnalité réelle de ceux qu’elle côtoie. Son intuition redoutable fait d’elle une jeune fille difficile à berner et remplie du bon sens qui manque à tant des adultes qui l’entourent. Ce sens aigu de l’observation permet à l’auteure de jolies représentations : « Je ne sais pas comment était la mère avant […] mais elle se comporte désormais comme si la vie était une grosse voiture en panne qu’elle devait pousser sur la route. Elle marche en diagonale, comme pour affronter une pluie battante, même quand il fait très beau. »
Aussi, comme elle hérite du rôle de narratrice du récit, Eulabee est amenée à décrire son propre ressenti, ce qu’elle fait en termes imagés venant enrichir la lecture : « J’ai l’impression d’être une de ces poupées russes […] Toutes mes enveloppes extérieures me sont retirées, révélant celle que je suis vraiment, tout au fond de moi : la plus petite poupée, celle aux traits incertains, incapable de tenir debout toute seule. »
À la fermeture du livre, reste à l’esprit cette affirmation d’un des personnages, justifiant à elle seule tout le roman : « Nous étions toutes façonnées pour être des copies conformes. La seule façon de s’en sortir, c’était d’être extraordinaires. »
304 pages
Retrouvez ce roman aux Editions Albin Michel
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